Depuis 1999, les prix du pétrole brut ne cessent d’augmenter. Les experts prédisent chaque année un retour à la « normale » des cours du pétrole qui ne se produit pas. Récemment, les experts ont tablé sur une récession américaine, prévue pour le début de l’année 2008, pour espérer encore une baisse du prix du brut.
Il faut dire que par le passé, l’état de l’économie du plus gros consommateur de pétrole au monde a toujours été un bon baromètre pour évaluer les prix du pétrole. Pourtant, alors que de plus en plus d’économistes prévoient une récession sévère aux États-Unis pour le premier semestre 2008, les cours du pétrole poursuivent leur envolée comme si de rien n’était. Gênant.
Les experts du pétrole se sont donc mis à élaborer d’autres théories. Observant l’appétit insatiable de la Chine pour le pétrole, certains espèrent toujours qu’une récession américaine calmera les cours, parce qu’une telle récession diminuerait les importations de biens chinois, et par ricochet la demande chinoise de pétrole.
D’autres avancent que c’est justement à cause du ralentissement économique américain que les cours du brut s’envolent. C’est que la faiblesse de l’économie américaine cause une chute du dollar US. Comme les prix du pétrole sont cotés en dollars US, ils s’envolent, mais reviendront à la normale lorsque l’économie américaine et sa devise se remettront sur pied.
Ces théories contradictoires en disent long sur l’incapacité des experts à expliquer la crise actuelle. N’en déplaise à certains, l’Amérique n’est plus le centre du monde en terme de consommation de pétrole, laquelle consommation s’explique de plus en plus par la croissance économique chinoise et la demande des pays producteurs de pétrole… qui profitent de leur pouvoir d’achat accru suite à l’envolée des prix du pétrole !
Il y a aussi la sempiternelle instabilité géopolitique. Dès qu’une crise quelconque implique un pays producteur de pétrole, on saute sur l’occasion pour expliquer telle ou telle hausse de prix. Pour se convaincre de la faiblesse de l’argument, il suffit d’observer les prix du pétrole depuis vingt ans. Au cours de la première décennie (1988-1998), on voit une stabilité remarquable des prix du brut aux environs de 20$ le baril, avec toutefois une petite pointe à 40$ le baril en 1990-1991. À partir de 1999 et jusqu’à 2008, les prix s’envolent jusqu’à 125$ le baril.
La petite pointe dans les prix en 1990-1991, c’est la guerre du Golfe. L’invasion du Koweït par l’Irak, les Scuds qui volent au dessus de l’Arabie saoudite, les combats entre la la Coalition et l’armée irakienne au Koweït et en Irak, les craintes que l’Iran ne soit impliquée dans le conflit, la destruction des puits koweïtiens, l’embargo sur le pétrole irakien… et l’on voudrait que les prix actuels, trois fois plus élevés, s’expliquent par la crise au Nigéria ?
En réalité, la demande mondiale de pétrole demeure soutenue malgré les prix élevés au même moment où la production stagne. Il ne se découvre plus de gisements majeurs depuis des décennies, même si on annonce à l’occasion des découvertes exceptionnelles qui ont tôt fait de se dégonfler. La dernière bulle pétrolière : le gisement géant Carioca de la compagnie Pétrobras (Brésil), dont les réserves probables ont été mises en doute immédiatement après l’annonce de la découverte par Crédit Suisse, puis par les dirigeants de Petrobras eux-mêmes.
Ils sont de plus en plus nombreux à évoquer le « pic pétrolier », soit le moment où la production mondiale de pétrole aura atteint son sommet et ira inexorablement en diminuant, compte tenu qu’il s’agit d’une ressource finie et non renouvelable dont une grande partie a déjà été exploitée.
Et si, plutôt que d’espérer encore un éventuel retour des prix à la « normale », nous prenions une fois pour toute les moyens de nous débarrasser de notre dépendance au pétrole et de réduire notre boulimie énergétique ?
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