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Le retour du bacon

Le 14 février, 250 personnes se sont présentées au bureau de Patapouf, à Montréal, pour lui remettre une lettre d’amour. Des membres de la Coalition rurale du Haut-Saint-Laurent, de la Coalition citoyenne, de l’Union paysanne et de la communauté Mohawk de Kanawake ont bruyamment appuyés la mairesse de Elgin, déléguée auprès de Patapouf.

C’est que le gouvernement a levé le moratoire sur l’expansion de l’industrie porcine. Les gros industriels se sont donc remis à déposer des projets. À Chapais (Nord-du-Québec), le maire de l’endroit est aussi un promoteur porcin mégalomane : il a un projet de 135 000 porcs, du jamais vu en Amérique du nord. Ailleurs au Québec, les citoyens d’une bonne vingtaine de municipalités d’opposent à d’autres projets.

La lettre d’amour, écrite dans un style ironique, accuse Patapouf de trahir sa promesse envers les citoyens ruraux et de retourner à ses amours « avec Miss Peggy ». Elle demande aussi, plus sérieusement, de ne pas oublier que le bassin versant du Haut-Saint-Laurent procure l’eau de Montréal…

La mairesse Daoust est revenue très fâchée de sa délégation : « Le premier ministre est un lâche ! Il n’a pas daigné se présenter recevoir sa lettre. » Il a préféré envoyer au front une quelconque secrétaire. Interrogée à savoir si son village peut bloquer un projet porcin, maintenant que le gouvernement a modifié la loi, elle répond par la négative : « C’est de la foutaise, it’s pig shit. La loi 54 dit que les municipalités vont pouvoir tenir des consultations publiques. Mais qui veut remplir son conseil de ville de citoyens mécontents ? » De plus, la ville peut réglementer certains aspects (haies et couvercles anti-odeurs, distances des résidences, etc.), mais un paragraphe de la loi 54 modifiée stipule : en autant que cela n’affecte pas les finances du promoteur…Et finalement, il est impossible de refuser d’accorder le permis.

Benoît Girouard, secrétaire général de l’Union paysanne, tient un discours différent : « Mulcair vient d’imposer un autre moratoire dont personne n’a parlé : l’interdiction de défricher et cultiver toute terre considérée vierge en 1990. Cela signifie que les intégrateurs qui ont acheté des terres vierges ne peuvent, mêmes si elles sont défrichées aujourd’hui, les mettre en culture. » Le moratoire touche tous les secteurs de production, mais il visait spécifiquement l’industrie porcine, grosse consommatrice de terres sans phosphore. Il sera donc très difficile, selon lui, d’assurer la croissance de l’industrie. D’autant plus que le porc québécois aurait perdu de son lustre sur les marchés internationaux…

Une chose est toutefois certaine : l’opposition citoyenne à l’industrie porcine se réveille après deux ans de sommeil. Les industriels de la porcherie ne pourront pas, impunément, se remettre à faire du bacon sur le dos de notre environnement et de notre santé.

Le Couac des champs

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